Exhala de Gaby Vargas par Aída María López

Exhala, Gaby Vargas, Aguilar, 2023 [Inédit en français]

Les ténèbres sont toujours présentes,

mais à côté d’elle,

la lumière est aveuglante.

Luis Antonio Durán

Si pour la plupart des gens la mort est synonyme d’obscurité, pour Socrate, père de la philosophie morale, elle représente en réalité la libération de l’âme, car le corps n’est rien d’autre que la prison qui la soumet à ses besoins. Ayant vécu un deuil important, Gaby Vargas propose aux lecteurs d’expirer[1]. Entre ses mains, l’écriture voudrait être cette lumière aveuglante qui éclaire les jours sombres où elle a perdu l’amour de sa vie.

Dans un exercice d’introspection, l’autrice se remémore les 54 années de bonheur qu’elle a vécues avec Pablo. En écrivant Exhala, elle soigne son cœur par des méditations jusqu’à ce qu’elle accepte que tout ira bien malgré l’absence physique de son mari. Bien que la mort d’un être cher soit quelque chose que nous devons tous vivre, elle ne peut cependant être sublimée. C’est pourquoi, à la fin du livre, Gaby Vargas propose des recommandations pour se remettre de l’absence puisque, malgré tout, la vie poursuit son cours.

Elle partage également ses lectures des écrits du poète mystique persan, Rûmî, qui lui permettent de donner un sens à sa guérison. Guidée par les enseignements de ce maître spirituel musulman du XIIIe siècle, elle comprend par exemple qu’il ne faut pas s’affliger face à la perte car les défunts reviennent sous une autre forme. À chacun, à présent, de découvrir comment l’amour perdu se manifeste dans sa vie, puisque mort ne rime pas avec perte définitive. Au contraire, une fois qu’il a fleuri, il s’enracine à jamais dans le cœur.

Dans la première partie de son récit, Gaby Vargas retrace, à la deuxième personne du singulier, le parcours fastidieux du myélome multiple de Pablo. Le soliloque se développe devant une photo de l’anniversaire de son mari ; personne ne pensait que ce serait le dernier. Comme le rapporte l’autrice, le mélange d’innocence et d’illusion a aidé la famille à traverser les hauts et les bas jusqu’au moment des funérailles. Sans aucun doute, la mort est une visite que personne n’attend, ou ne veut recevoir, comme dans le poème « La maison d’hôtes » de Rûmî dans lequel l’autrice se réfugie dans la gratitude et l’acceptation.

La deuxième partie traite de l’importance de la respiration consciente pour atteindre la sensation d’être au paradis, car l’harmonie est l’œuvre de l’esprit et la conséquence d’une décision personnelle. La troisième et dernière partie, que l’on pourrait qualifier de sentimentale, est centrée sur l’intériorité. Elle aborde l’espoir d’un nouveau départ, d’une nouvelle manière de voir le monde. Il est alors question de transformation : faire du vide laissé un espace qui nous rappelle que chaque étape de notre vie vaut la peine d’être vécue. Il est donc fondamental de s’autoriser à ressentir toutes sortes de sentiments jusqu’à atteindre l’acceptation et la gratitude. Et n’oubliez pas : exhalen !

Aída María López

Traduction L’autre Amérique


[1] « Exhalar », signifie expirer en espagnol. Dans cette phrase : « souffler un bon coup » N.d.T.