
Vivant retiré en Patagonie et se consacrant à ramener à la vie sa compagne torturée sous Pinochet, Juan Belmonte, ancien sniper d’élite formé dans l’une des meilleures académies militaires de l’ex Union soviétique, comprend brutalement que pour lui la « fin de l’histoire » n’a pas encore sonné : de vieilles connaissances, en effet, vont chercher à lui imposer une mission qu’il aura du mal à refuser…
Car Belmonte fut de toutes les luttes, de toutes les révolutions. Combattant légendaire et intègre, son souvenir continue d’impressionner ceux qui l’ont croisé au Nicaragua, en Bolivie ou encore en Tchétchénie. Proche d’Allende il combattit Pinochet, et Veronica, sa compagne, en paya le prix fort. De ces victoires, de ces défaites, de ces désillusions, il a gardé des liens « à la vie, à la mort » avec certains frères d’armes qui le soutiendront dans son dernier combat.
Ce roman court, mais dense, n’est pas de tout repos pour le lecteur. Luis Sepúlveda, concis et extrêmement bien informé, dénoue les fils enchevêtrés d’une histoire qui traverse le vingtième siècle dans toute sa complexité. Nous avions bien besoin de son éclairage pour comprendre ce qui relie, dans ce grand tourbillon, la destinée de cosaques russes blancs alliés aux SS durant la deuxième guerre mondiale, et le régime de Pinochet sous la dictature.
Sepúlveda nous livre ici un thriller politique et historique très noir. Il nous y révèle le sens d’évènements mal connus et enfouis, ainsi que l’influence persistante de personnages et d’organisations œuvrant dans l’ombre au service de puissants intérêts politiques, diplomatiques, économiques et commerciaux.
Il nous avait prévenus en exergue : « La littérature raconte ce que l’histoire officielle dissimule ».
Ce livre, sorti en 2017 en France, fut le dernier roman de Luis Sepúlveda. Il y revisite nombre de thématiques déjà présentes dans son œuvre, au premier rang desquelles la douloureuse histoire politique de son pays d’origine, le Chili.
Opposant de la première heure à Pinochet, il demeura jusqu’au bout fidèle à ses engagements politiques, malgré la prison et l’exil. Ce fut finalement le Covid qui eut raison de l’écrivain et du journaliste, le 16 avril 2020.

La fin de l’histoire de Luis Sepúlveda
Traduit de l’espagnol (Chili) par David Fauquemberg
Métailié, 2017, 204 p. [El fin de la Historia, Tusquets 2017]