Mangeterre, Dolores Reyes, éditions de l’Observatoire, 2020 [Cometierra, ediciones Sigilo, 2019]
Comment accepter la mort d’une personne aimée et l’abandonner à jamais à la terre ?
Une adolescente, la narratrice, comble le vide laissé par la mort de sa mère en remplissant sa bouche et son ventre de la terre qui a entouré le corps. Elle découvre alors que ce rituel lui donne à voir les circonstances cachées de son décès. En répétant ce procédé, elle élucide ensuite d’autres disparitions restées jusqu’alors mystérieuses. Des situations violentes qui brossent en creux le portrait d’un quartier périphérique de Buenos Aires dominé par le désœuvrement, les règlements de compte et l’impuissance de la police. Mangeterre, la bien-nommée, point d’ancrage dans un monde sans repère, devient alors le seul espoir de plusieurs familles. Un poids parfois trop lourd à porter.
Ce premier roman s’empare d’un sujet d’actualité, celui des féminicides, très nombreux en Argentine ces dernières années. Il pose la question de l’engagement individuel et collectif dans la lutte contre ces crimes tout en s’inscrivant, par ses fulgurances poétiques et la figure de la jeune fille extralucide, dans le sillon des grands romanciers du réalisme magique, Isabelle Allende et Gabriel García Márquez.