Un doux parfum de mort par Luis Samaniego

Guillermo Arriaga, Un doux parfum de mort, Phébus, 2003 [Un dulce olor a muerte, Grupo Editorial Planeta, 1994]

© Cecilia Guerrero

La manière dont ce roman a été écrit permet de lire la version originale ou la traduction française indifféremment. Cela ne change en rien les sensations produites par l’intrigue. Normalement, ce sont les subtilités propres à chaque langue qui créent les différences de perception. Cependant, dans Un doux parfum de mort, la description des faits est presque réduite aux actions, les passions sont aussi nettes et effilées que la lame d’un couteau et les objets on ne peut plus banals. 

Le charme secret du livre provient du mécanisme narratif qui fait s’enchaîner des événements disparates dans une tragédie en continu. Pourtant, à chaque instant les choses pourraient se dérouler autrement. Lorsqu’un personnage a la possibilité de changer la trajectoire d’une catastrophe annoncée, il hausse les épaules et, impassible, laisse passer cette opportunité. 

Au début de l’histoire, une fille est assassinée d’un coup de couteau dans le dos. Comment ne pas penser à toutes ces autres femmes mortes violemment au Mexique ? Comment ne pas vouloir pourchasser le coupable d’un acte si vil ?

Des gamins du village sonnent l’alerte et conduisent Ramón, un jeune épicier de seize ans, auprès du corps. Il ne tardera pas à devenir le suspect du crime, mais le village finit par lui attribuer le rôle du fiancé de la morte. D’ailleurs, dans Le Sauvage, Arriaga raconte une tradition troublante par sa similitude avec cette situation : 

« Dans les montagnes de Transylvanie, lorsqu’une jeune fille meurt avant d’avoir pu se marier, le village lui prépare une cérémonie nuptiale. La stragoli, ou âme inachevée, est furieuse d’être morte avant l’heure. Elle a envie de massacrer les vivants avant de rejoindre l’autre monde. Ces noces symboliques sont censées l’apaiser. » p. 149

Les représentants de l’ordre font leur apparition. Le moins gradé, le délégué communal, essaie d’éclaircir les faits, pas tant pour rendre justice que pour confirmer ses intuitions de vieux loup. Par contre, son supérieur, le chef de la police rurale, cherche uniquement à en tirer profit par extorsion judiciaire, dès que l’occasion se présente. 

Au même moment, un couple adultère vit la fougue de leurs amours interdites. Obnubilés par leurs ébats, les amants se laissent entraîner et suivent le doux parfum de la mort, jusqu’à leur perte. Mais parmi tous ces événements, essayez de ne pas oublier le coupable…