Olinka d’Antonio Ortuño par Luis Samaniego

Antonio Ortuño, Olinka, traduit de l’espagnol (Mexique) par Margot Nguyen Béraud, Christian Bourgois, 2021 [Olinka, Seix Barral, 2019]

© Christian Bourgois éditeur DR

Aurelio Blanco est en prison depuis quinze ans. Malgré tout ce temps et la relative tranquillité de la section dans laquelle il est incarcéré, il n’a pas prévu de plan pour son retour à la liberté. Quand ce jour arrive, il découvre que la ville de Guadalajara a énormément changé, principalement à cause des millions de provenance douteuse investis dans l’immobilier.

Blanco a accepté d’aller en prison à la place de Carlos Flores, son beau-père. Ce dernier, un important entrepreneur du BTP, est l’objet de diverses enquêtes portant sur le blanchiment d’argent investi dans son projet de lotissement : « Olinka ». 

Le gendre devait purger deux ans de prison en échange d’une somme considérable d’argent. Finalement il passera quinze ans à l’ombre avec l’intention d’exiger des comptes à sa sortie de prison.

Antonio Ortuño (Guadalajara, 1976) dépeint sans concession la bourgeoisie de sa ville natale. Cette classe dominante qui, d’après lui, accapare le pouvoir depuis plusieurs siècles. Aujourd’hui la provenance douteuse de leurs capitaux ne fait que mettre en évidence leur hypocrisie. La violence dans ce roman ne se trouve pas véritablement dans les coups de feu mais dans les répliques acerbes du clan Flores : un langage tantôt recherché et tantôt grossier.

L’auteur prête une attention particulière aux dialogues des différents personnages. La compréhension de leur psychologie est plus facile à saisir dans l’atmosphère qu’il construit progressivement. Nous sentons l’influence de Patricia Highsmith, dont l’écrivain est un grand admirateur.

Malgré les inégalités dans la population, les autres classes sociales ne sont pas plus honnêtes que ces bourgeois corrompus car elles s’arrogent par tous les moyens, chacune dans sa sphère, une parcelle de pouvoir : un commandant de police se montre un peu trop arrangeant, la famille Blanco apparaît indifférente au sort d’Aurelio et ce dernier espère gravir quelques échelons dans la société en se révélant terriblement servile.

Depuis ses débuts, Antonio Ortuño est considéré comme un auteur mexicain prometteur. Donc, nous sommes entre de bonnes mains. Laissons-nous surprendre par les péripéties de l’histoire de cette famille si singulière.

Luis Samaniego